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La Diagonale des Fous 2025 : Quand l'île intense défie les limites

Publié le 16 octobre 2025

Saint-Pierre, Réunion, 16 octobre 2025 – 22 heures. Les 2845 "Fous" s'élancent dans l'obscurité. La Diagonale des Fous, épreuve reine du 33e Grand Raid de La Réunion, n'est pas qu'un ultra-trail. C'est un monument de l'endurance où seuls les plus tenaces gravent leur nom. À l'heure où les premiers mètres se transforment déjà en supplice, zoom sur cette édition 2025 qui promet du spectacle, de la souffrance et, inévitablement, des larmes de joie au Stade de La Redoute.
La Diagonale des Fous 2025 : Quand l'île intense défie les limites

L'histoire d'une folie collective

Remontons le temps, car la Diagonale n'est pas née d'hier. En 1989, sur une île encore en quête d'identité sportive, Jean-Jacques Mollaret, un traileur visionnaire, lance la "Marche des Cimes" : 112 km de sentiers impitoyables reliant Saint-Denis à Saint-Philippe, avec 5 500 m de dénivelé positif. Première du genre au monde, elle attire 200 audacieux et pose les bases d'un événement qui transcende le sport.

En 1993, la course frôle la faillite, mais renaît sous le nom de "Course de la Pleine Lune". Puis, en 1994, l'homme de presse Bernard Morin, journaliste à Jogging International, la baptise "Diagonale des Fous". Pourquoi ? Parce qu'il faut être un peu cinglé pour avaler 130 km et 6 900 m D+ en autonomie, sous les tropiques.Aujourd'hui, classée parmi les cinq "monuments" de l'ultra-trail mondial – aux côtés de l'UTMB, Western States ou Hardrock 100 –, elle symbolise l'âme réunionnaise : un mélange de rébellion esclavagiste (les marrons fuyant les plantations via ces sentiers secrets) et de résilience insulaire. "C'est plus qu'une course, c'est une exploration de soi au cœur du Parc national de La Réunion, classé UNESCO pour ses pitons, cirques et remparts", confie un organisateur. Et les chiffres parlent : sur 66 heures max, seuls 50 % des partants franchissent la ligne. Le reste ? Des abandons épiques, forgés dans la boue et la chaleur.

Le parcours 2025 légèrement modifié

Pour cette 33e édition, la Diag' s'allonge subtilement : 178 km et 10 122 m D+ (contre 175 km et 10 500 m en 2024), avec une nouveauté qui fait saliver les puristes – ou trembler les novices. Le tracé intègre désormais le Belvédère de La Vigie, un sentier aérien surplombant le cirque de Mafate, ajoutant 4 km de vertige pur. Départ de la Ravine Blanche à Saint-Pierre (sud-ouest), direction nord vers Saint-Denis. Au menu : traversée des cirques de Cilaos, Salazie et Mafate – ces amphithéâtres naturels sans accès routier –, ascension du Piton de la Fournaise (le volcan actif qui sommeille), et descentes techniques comme le Chemin des Anglais, pavé de lave qui ronge les chevilles.

Les étapes clés ? Après les premiers ravitos à Domaine Vidot et Notre-Dame-de-la-Paix, les coureurs filent vers Mare à Boue (froid mordant de nuit), puis Cilaos au lever du soleil. Vient le cœur noir : Mafate, avec ses montées raides, ravins et rivières gonflées. La fin ? Une bascule vers La Possession, le Maïdo (vent furieux), et l'arrivée émouvante à La Redoute, souvent dans les lueurs du crépuscule. "Peu de portions roulantes, tout est monte ou descente. La météo change en un clin d'œil : chaleur étouffante le jour, froid polaire la nuit", résume un habitué. Barrières horaires impitoyables (66 h total) : ratez-en une, et c'est l'élimination. Diffusion en direct sur Réunion La 1ère et France.tv pour suivre les souffrances en HD.

Les élites et favoris

Après le triomphe de Mathieu Blanchard (23h25 en 2024) et Manon Bohard (31h49), absents cette année, le champ est libre pour une bataille royale. Chez les hommes, Ludovic Pommeret (50 ans, Team Hoka) est le grand favori : vainqueur en 2021, 2e à trois reprises, il débarque frais après une 6e place à l'UTMB et une Hardrock 100 remportée. "Ma huitième Diag', c'est mon jardin", lâche-t-il, sourire en coin. À ses côtés, Aurélien Dunand-Pallaz (2e UTMB 2024) vise un premier coup d'éclat sur l'île, avec sa foulée aérienne et son chrono de 11e aux Mondiaux de trail. Beñat Marmissolle (vainqueur 2022) revient en mode revanche, malgré une saison en dents de scie, tandis qu'Arthur Joyeux-Bouillon (jeune explosif, impasse sur l'UTMB pour se concentrer) et Baptiste Chassagne (solide outsider) complètent le top. Côté locaux, Fabrice Payet (6e en 2023, 1er Réunionnais) rêve de podium à domicile.

Du côté femmes, Blandine L'Hirondel (Team Kiprun, double championne du monde) est l'ogresse annoncée : c'est ici, lors de ses études de médecine, qu'elle a découvert le trail il y a dix ans. "La Diag', c'est mon retour aux sources, avec l'ambition de la dompter." La Canadienne Marianne Hogan (double vice-championne Western States et UTMB) défie le destin avec fraîcheur – dernière minute pour elle, après une pause forcée. Sylvaine Cussot et Sarah Vieuille (4e en 2022) guettent la faille. Hannes Namberger (Allemand, 4e UTMB 2024) et Alexis Sevennec (ex-ski-alpiniste français) ajoutent du piment au scratch. "On s'entraîne toute l'année pour ça", résume Hogan. Suspense garanti : la Diag' pardonne rarement les favoris.

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